STAGE D'EQUITATION
Nous étions venus passer l'été en Bretagne et du côté de la ville de Lannilis , en bordure de l'Aber Benoît , nous avions découvert un centre équestre qui nous plaisait beaucoup . Il y avait une cinquantaine de chevaux et c'est là que j'ai appris à bien monter grâce aux stages . En effet pendant un mois de vacances , on était à la fois cavalier , palefrenier , soigneur , aide du maréchal ferrant qui ne ferrait qu' à chaud à l'époque et accompagnateur de balade sur les chemins bordant les grèves de ce fond si joli de l'Aber Benoît ! L'endroit était vraiment magnifique , un vieux manoir en restauration , des bois et des pâtures qui descendaient jusqu'à l'eau . C'est là que j'ai également passé mon premier degré , à l'époque c'était le premier examen d'équitation qui consistait en une reprise de manège , des sauts d'obstacles , de la voltige et bien sûr des questions d'hippologie . Ensuite c'était le 2nd degré puis le 3ème et enfin le monitorat .Maintenant cela se nomme Galops !Personnellement , je me suis arrêtée au premier degré , ma vie d'étudiante puis familiale m'ont empéché de persévérer dans l'obtention du 2 nd degré .
Donc ce mois de juillet je le passais en compagnie d'une quinzaine de camarades dont mes trois frères et nous organisions tout : nos courses , nos repas , notre budget , comme des grands, avec tours de cuisine , de vaisselle , d'épluchage , de ménage , de courses , nous avions une quinzaine d'années , c'était génial !
Un après-midi très chaud , le palefrenier nous demanda à Jacqueline et à moi-même de bien vouloir aller faire marcher dans l'eau , deux juments qui avaient un problème de boiterie: Mireille et Sirène !
Quelle chance nous avions , avec juste un licol et une longe , à cru , chacune sur notre monture , nous avons quitté l'écurie , je montais Mireille ,une belle jument baie et Jacqueline , Sirène , une petite jument alezane crins lavés . Passant sous le tilleul séculaire, derrière la chapelle , nous sommes descendues tranquillement vers le kiosque , jolie petite construction en bordure de l'Aber Benoît d'où l'on pouvait observer le paysage tranquillement à l'abri .
Ensuite , nous avons bifurqué sur notre gauche et la grève , parsemée de galets , de quelques rochers et de goémons , s'étendait juste là !
En premier lieu , nous avons conduit les juments au bord de l'eau et sautant à bas de nos montures , comme nous avions nos bottes , nous avons marché à côté d'elles . Et puis la même idée nous traversa l'esprit , c'était très isolé comme coin , donc , chacune notre tour , nous avons ôté nos tenues de cavalières , ne gardant que nos sous-vêtements et après être remontées sur le dos de nos juments , nous avons pu les faire marcher plus profondément dans l'eau saumâtre de l'Aber . Mireille trouvant cette baignade géniale, s'est couchée un peu sur le flanc et elle s'est mise à nager , vite imitée par Sirène . C'était amusant comme sensation ! Au bout d'un quart d'heure , le froid se faisant sentir , nous sommes ressorties bien mouillées et , tenant chacune notre cheval , nous nous sommes assises sur un rocher pour sécher un peu , une fois que les deux juments s'étaient bien ébrouées .
Au bout d'un moment , voulant regarder l'heure puisqu'on avait une reprise à 17 H30, Jacqueline me confiant la longe de Sirène , est allée récupérer sa montre dans la poche de son blouson , un peu plus haut , à l'endroit où nous avions posé nos vêtements .
Incroyable mais vrai , nos habits avaient disparu ! Pas la peine de chercher les auteurs , c'était signé !
Evidemment , comme nous n'étions que trois filles dans notre groupe de stage , les garçons ,en nombre important , venaient de faire un coup d'éclat !
Jacqueline , fille unique , était assez paniquée , aussi, je lui ai conseillé de garder les chevaux et d'aller se mettre à l'abri derrière le coude que faisait la rivière , j'allais nous chercher au manoir de quoi nous vêtir décemment , très prudemment , surtout sans me faire voir , afin de ne pas laisser aux garçons la joie d'avoir accompli l'exploit du stage d'été !
Le plus ennuyeux , c'était les bottes..., donc nu-pieds , en culotte et soutien-gorge blanc à pois roses , je me suis faufilée , après avoir remonté allées et pâtures , évitant ronces et crottins , dans l'escalier d'une des deux tours qui conduisait à notre appartement de stage . Tout était calme , sortant du sac de linge sale ma culotte de la veille et mon T'shirt , je chaussai des bottes trouvées dans la salle , après m'être rincé les pieds dans l'évier de la cuisine , puis récupérant un de mes jean's propre et un polo , l'oreille aux aguets , je dévalai l'escalier puis un étroit sentier de randonnée jusqu'à Jacqueline qui m'attendait avec anxiété. Elle enfila mes vêtements , je lui refilai les bottes étrangères et enfourchant nos montures , nous avons fait un détour à travers les champs de maïs , toujours au pas pour ne pas fatiguer les juments et à l'abri de tous regards .
Le palefrenier , seul à l'écurie , nous remercia , on s'enquit discrètement sur l'endroit où se trouvaient les garçons !
- Mais tu es pieds nus me dit-il étonné !
- Ah mince , pour baigner les chevaux c'était plus facile !
Il me passa une paire de bottes vertes que l'on chaussait pour faire les boxes et le fumier , puis Jacqueline et moi-même , nous rentrâmes discrètement à l' appart !
Nous nous sommes entièrement changées , sauf évidemment les bottes , puisque nous n'en avions qu'une seule paire et ça nous embêtait beaucoup !
Soudain , on a entendu une cavalcade dans les escaliers , mûes par un même réflexe , nous nous sommes cachées sous nos lits ! C'était bien les garçons , la porte s'est ouverte à toute volée , heureusement que nous n'étions pas cachées derrière ! Une voix en bas demanda :
- Alors ???
Une autre dans la cuisine répondit :
- Non ! Elles ne sont pas là non plus !
Puis une autre voix enchaîna , elle venait de l'étage :
- Qu'est-ce qu'on fait de leurs fringues ???
Pitié pas sous nos lits !!!!!!
- On n'a qu'à les mettre derrière le rideau , là où on range les bottes !
- Allez, passe !
Un clin d'oeil à Jacqueline , puis j'entendis la voix de mon grand frère resté au bas de l'escalier .
- Toi, tu vas aux écuries , toi , au bar et nous , on repart à l'Aber !
Vlan , la porte s'est refermée , on a attendu un petit moment et on s'est précipité sur nos bottes . Ensuite récupérant nos affaires qu'ils venaient de rapporter , je les ai fourrées dans le sac de linge sale , sac que nous avons emporté pour le mettre devant la buanderie afin que la propriétaire lave le contenu ! Toujours l'oreille aux aguets puis avec des ruses de Sioux , nous avons traversé la petite cour et c'est dans la chapelle , transformée en débarras que nous avons attendu tranquillement , l'heure de notre reprise de fin de journée !
Silence de mort à notre arrivée aux écuries , notre moniteur avait commencé la distribution des chevaux pour la reprise , j'allais monter Bémandja , une immense jument baie brune assez lunatique et Jacqueline , Belle une fine jument baie , on aurait pu tomber plus mal !
- Vous étiez passées où ? Mon petit frère attaquait !
- Si tu savais l'histoire ! On aidait deux Anglaises , figure-toi que des idiots leur ont fauché leurs vêtements , pendant qu'elles se bronzaient sur la plage...
- ??? !!!
- Elles sont parties porter plainte à la gendarmerie , faut , vraiment ne rien avoir dans la cervelle , ni grand chose à faire pour s'amuser à des idioties pareilles , non , tu ne trouves pas ?
- Wouais !!!!
Et hop en selle , le moniteur venait de nous donner l'ordre . Mon petit frère tirait une sale tête , il essayait de faire passer le message aux autres garçons qui devenaient de moins en moins attentifs , ils se parlaient même , si bien que le moniteur n'arrêtait pas de leur faire des remarques ! Je crois bien qu'ils vivaient leur plus mauvaise reprise du stage de Juillet , certains étaient même très mal à l'aise ! Jacqueline et moi , nous jubilions silencieusement , mais c'était divin , non mais ce n'est parce que nous étions en minorité que nous devions subir la pression de la masse dominante !
Fin