LES ASTICOTS

J'étais un petit peu plus âgée et nous avions réintégré le Midi de la France .Notre maison comportait deux étages d'un côté et trois de l'autre à cause du pentu de la colline . Devant la cuisine , une sorte de loggia nous permettait de prendre nos repas dehors puisqu'elle était ombragée par un immense et vieux figuier qui nous offrait de délicieuses figues violettes sucrées à souhait ! C'était mon endroit favori, je traînais toujours par là , entre terrasse et potager et ma grand-mère qui nous élevait la plupart du temps, surtout lorsque mes parents partaient à l'étranger, avait toujours un plat à me faire goûter, des fèves ou des haricots à écosser , du pistou ou du thym à aller quérir en bas du potager et j'adorais m'acquitter de ces petites tâches qui semblaient aider ma grand-mère .

  Je détestais faire mes devoirs, toute seule dans ma chambre, à mon bureau , j'avais l'impression d'avoir été punie, donc , je m'installais sur un coin de la grande table de la cuisine et dans les odeurs de ratatouille , rouille et autre bourride, j'apprenais tranquillement mes leçons du jour . Ma grand-mère parlait avec Maria , une dame corse âgée , qui l'aidait et j'adorais écouter leurs histoires !

        Un soir , elle me demanda d'aller jeter à la poubelle des ordures rassemblées dans des feuilles du quotidien local  . Sautillante comme à mon habitude ,accompagnée de mon chat Rajah , un demi persan gris-bleu qui ne me quittait jamais , je m'empressais d'accomplir ma mission .

Lorsque je suis arrivée à la poubelle , une grosse poubelle bleue , ronde avec couvercle , j'ai eu un mal fou à ôter le dit couvercle, on aurait dit qu'il était collé , il faut préciser qu'il avait fait très chaud dans la journée . Ayant posé mon paquet par terre , je m'y suis prise à deux mains et enfin , celui-ci céda sous ma forte pression entraînant avec lui , une immonde masse d'asticots qui me fit lâcher le couvercle et un cri , mais un horrible cri d'horreur, tandis que je sentais tous mes poils et mes cheveux pourtant très longs se dresser sur ma tête et que je trépignais de dégoût sur place !

Qui de Maria ou de ma Grand-Mère gagna la course en descente jusqu'à moi, je ne m'en souviens plus , mais en tout cas , elles me consolèrent toutes les deux , m'assurant que c'était vraiment dégoûtant . Bien sûr , les garçons avaient rappliqué au triple galop .

- T'as peur de ça ?

Vraiment ça les dépassait !

- Non , je n'ai pas peur , ça me dégoûte parce que ça grouille , c'est tout !

- Ah bon , rassure-nous!!

Je vous passe leur humour de jeunes fiers à bras genre :

- Mais c'est gentil ces petites bêtes !

- Regarde comme ils ont de beaux yeux !

- Allez , viens faire un bisou à tonton!

Et ils manipulaient tout ça , pour me montrer leur supériorité ! Bref , à partir de ce moment , j'ai été dispensée de poubelles ! Une rencontre m'avait amplement suffit , sans façon pour le second round !

Fin